« Séminaires » de Michèle Rescourio Gilabert : un roman qui réhabilite la fonction RH !

« Séminaires » : un roman qui réhabilite la fonction RH »


Article de Anne Barlet, 15 mai 2020

« Séminaires » est paru en mai dernier, et a donné lieu à un article dans la revue Actuel-RH. Voici l’article, suivi de quelques mots de l’auteur.  

« Experte des relations sociales, Michèle Rescourio-Gilabert, met en garde avec ce premier roman, « Séminaires« , la fonction RH qui s’est éloignée des préoccupations des salariés pour se focaliser sur les process ou « dire le droit ». L’occasion pour l’ex DRH de livrer sa propre vision du métier. Loin du RH bashing qui secoue la profession.
Avec ce premier roman, « Séminaires », Michèle Rescourio-Gilabert surprend. Cette DRH de la Fondation santé des étudiants de France, directrice adjointe de l’Institut supérieur du travail et ex directrice du pôle dialogue social d’Entreprise & Personnel, de 2007 à 2017, co-auteure pendant plusieurs années de la note de conjoncture sociale d’E&P sur le climat social, change radicalement de registre, en livrant une note plus personnelle des relations sociales. On y retrouve bien sûr son univers professionnel.
L’histoire débute par l’arrivée d’une DRH aguerrie, Claire Le Mer, dans une entreprise familiale, Medical services Group, à un « moment critique », celui du passage de la société « à l’âge adulte » ; le groupe dépassant 2 000 salariés.
En prenant sa mission à coeur, elle est loin d’imaginer ce qui l’attend, la menace d’un conflit social alors que l’entreprise s’apprête à lancer un projet phare ; le harcèlement sexuel ; les petits arrangements de l’équipe pionnière ; les postures syndicales, « ce jeu complexe à comprendre pour un néophyte » ou encore le durcissement de l’organisation majoritaire…

Un Codir trop fermé, des syndicats préoccupés par leur représentativité

Elle étrille au passage les travers de la gouvernance, « le fonctionnement en vase clos au sein du Codir » sans concertation, ni échange avec le personnel, l’éloignement des élus du personnel du terrain, trop attachés à défendre leur représentativité, qui discutent de sujets qui « ne répondent pas vraiment aux préoccupations des salariés ». Ou encore le « reporting » incessant devenu le seul outil de management…

Le roman donne également la vedette à un secrétaire national d’une organisation syndicale, Pierre, avec qui la DRH entretient une relation amoureuse. Duo incompatible ? La romancière conjugue ici vie professionnelle et vie personnelle pour établir un parallèle saisissant entre les deux fonctions qui « loin de s’opposer, partagent souvent les mêmes enjeux ».

L’occasion pour cette experte des relations sociales de livrer sa propre vision du métier : « la fonction RH s’est éloignée des préoccupations des personnes pour se focaliser sur les process ou dire le droit ». « Quel temps perdu à ne gérer les RH que comme des process, parler CPA, CPF, C3P ou RPS, tous ces acronymes dont j’oublie moi-même la signification. On ne parle plus de collectif de travail ; on ne se préoccupe pas non plus des salariés ».

« Redonner du sens au collectif »

Pour remédier à ces maux, l’auteure livre quelques clefs : échanges réguliers avec les organisations syndicales ; accompagnement des managers via une formation sur le droit du travail ; lancement d’un guichet unique pour répondre aux « clients internes » ; révision du process de recrutement ; mise en place de groupes de travail sur l’absentéisme et l’engagement des salariés, sur l’inaptitude au travail et le rôle du médecin du travail… La DRH, mère d’un « bébé de la loi Aubry I », est sur tous les fronts. Avec l’objectif de « redonner du sens au collectif ».

Un premier tome d’une trilogie aux antipodes du « RH bashing » qui secoue aujourd’hui la profession. Et à l’arrivée, un livre étonnant et attachant.

« Séminaires », publié sur Amazon en mars 2020 en version numérique et brochée. Il s’agit du premier tome d’une trilogie.

Mon entretien avec Michèle Rescourio Gilabert  
Comment t’est venu le désir d’écrire ?

Avant le désir d’écrire, c’est l’environnement de l’écriture qui m’a attirée. D’abord, les beaux stylos, le beau papier, les carnets d’écriture. Les pages sont restées bien souvent blanches. Ensuite, est venu le temps de l’achat d’un nombre considérable de livres sur le comment écrire, sur les ateliers d’écriture. Je devais tout savoir sur l’acte d’écrire. 
Mais n’était ce pas des prétextes pour retarder le passage à l’action et mettre à distance ce désir profond d’écrire ?
Lorsque je passais tout de même à «  l’acte », je me sentais tellement nerveuse ou excitée que je n’allais pas bien loin. Je n’étais pas prête. Mes carnets sur ces 20 dernières années racontent mon quotidien, les enfants petits, les rêves à incarner, ceux non réalisés mais tenaces. Les mots jetés là ainsi me servaient à m’alléger, à faire du vide en moi, vide qui ne restait guère longtemps tellement la vie était dense avec une carrière professionnelle qui battait son plein.
Quelques récits de voyage sont néanmoins nés et ont suscité de l’émotion parmi mes proches, je savais au fond de moi que j’avançais vers ce qui constituerait bientôt le noyau dur de ma vie future.

L’étape libératrice a été le passage par des écrits professionnels. Ce type d’écriture est exigeant, technique, sérieux. Des journées entières à écrire. Seul le mal de dos me rappelait les 10 heures passées sur une chaise à trouver les bons mots. Il fallait livrer à l’éditeur le manuscrit commandé. J’ai aimé parler de mes études, de mes livres professionnels, être interviewée par des journalistes. J’habitais mes sujets, j’étais heureuse de faire partager mes pratiques professionnelles au plus grand nombre. Tous ces séminaires,  animés pour des cadres, des dirigeants, des syndicalistes,  avec enthousiasme !

Et le temps est venu pour le roman. Que de détours, d’années passées à se rapprocher du but recherché ! J’ai écrit mon premier roman naturellement, sereinement. J’ai entamé le second. Je suis en harmonie profonde avec l’écriture, il m’a fallu 30 ans.

Comment réussis-tu à écrire ?

Je suis assez organisée dans les moments d’écriture. J’ai une activité professionnelle dense en tant que DRH et des journées plutôt longues. Je ne peux  écrire dans la semaine. Lorsque je suis sur un projet, je me donne des objectifs précis comme par exemple écrire 4 chapitres chaque week-end. Je pars dans mon havre de paix, ma maison sur la côte bretonne et j’écris devant la mer.

Je suis dans un silence complet ou simplement avec la mélodie du feu qui crépite dans la cheminée ou le flux et reflux de la mer. L’écriture me plonge dans une bulle où seuls mes personnages m’occupent.
Je compartimente beaucoup mon temps pour être sereine et surtout pour être présente dans chaque instant. Ainsi je suis là où je dois être.

Sur quoi travailles-tu en ce moment ?

Je suis partie sur une trilogie. Dans le premier roman, « Séminaires« , le personnage principal, la DRH, fait découvrir l’entreprise sous un angle moins négatif que ce que l’on veut bien montrer depuis dix ans (burn out, risques psychosociaux, suicides…). J’y décris les séminaires de lancement de nouveaux produits, les séminaires de travail, la vie de tous les jours sans oublier les doutes, la vie amoureuse de mon personnage principal. 
Je continue avec le second roman avec la vie plus intime d’un autre personnage rencontré dans le premier roman, la syndicaliste. Une quête plus intérieure. Mais elle travaille et son quotidien en entreprise n’est pas de tout repos !
Le troisième ? L’histoire du dirigeant mais je n’y suis pas encore.

Et l’édition ? Comment abordes-tu cette étape ?

Mon premier roman serait «  inclassable ». Roman certes mais bien incarné dans le monde de l’entreprise aujourd’hui. Aucun éditeur ne semble savoir où le classer et en vouloir. Au Japon, une littérature de ce type est assez courante, mais la littérature en France est tout autre.
Je suis donc passée par la phase d’autoédition sur le web et je fais ma propre promotion. C’est une étape qui me plaît.

Un conseil à donner à d’autres auteurs ?

Ecrire et prendre du plaisir. L’écriture permet de nous accomplir, de nous unifier pour s’ouvrir aux autres et faire société.
Ensuite, être lu, apporter du plaisir, du réconfort à des lecteurs est bien mais ce qui est le plus important pour moi c’est d’apporter avec l’écriture d’un roman du sens à ce que vivent les lecteurs.
L’écriture, acte solitaire par nature a cette magie de nous ouvrir au monde alors ne cessez jamais d’écrire !

Comment utilises-tu le coaching ?

Le coaching avec toi a été essentiel dans l’accouchement de mon premier roman. Je ne savais pas trop comment t’utiliser au début. Etre coaché, j’en parle sans arrêt au boulot pour des managers en difficulté. Mais le coaching littéraire est d’un autre ordre. Pour ce qui est de nos rencontres régulières, c’est d’abord un échange passionnant autour de mes personnages.
Tu ne joues pas le rôle de gardienne du temps, je n’avance pas plus si nous avons prévu un point. Tu m’accompagnes tout simplement. Tu es à mes côtés.
J’adore nos rencontres dans nos lieux fétiches, le premier roman restera attaché aux Editeurs, Carrefour de l’ Odéon, mon personnage elle aussi y avait ses habitudes. Le second roman, on est en période de découverte, qui sait si Montparnasse m’inspirerait  …

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