De l’hommage familial au roman, Hélène V

Le désir d’écrire ?

J’ai commencé à écrire des nouvelles dans l’adolescence, nouvelles que je ne terminais jamais et qui se voulaient à suspense. Je me souviens de l’objet de ma dernière « œuvre » inachevée dans laquelle il était question d’une poudre maléfique portant un nom complexe et qui était fabriquée par de dangereux savants. Ensuite, le temps est passé, j’ai mis mes envies d’écrire au placard pour m’occuper de mes études. Puis je me suis mariée, j’ai eu un enfant et l’envie d’écrire est réapparue par intermittence :  je la caressais et puis je la rangeais à nouveau dans son placard. Je la croyais morte d’inanition mais en 2016, sur une impulsion, je me suis inscrite à un atelier d’écriture Bing, juste « comme ça, pour voir ».
Avec Frédérique, au fil des propositions, j’ai découvert que l’envie n’était pas morte, loin de là. Alors que nous arrivions à la dernière partie de l’atelier, c’est ma sœur qui m’a encouragée à me lancer dans le récit sur lequel je travaille depuis maintenant deux ans, pour raconter notre histoire familiale et en particulier celle d’une personne qui nous tient particulièrement à cœur.

Comment fais-tu pour concilier l’écriture avec ta vie pro et perso ?

Il ne faut pas se leurrer, écrire demande du temps.
J’ai réservé du temps à l’écriture le soir en rentrant du bureau mais aussi le week-end. Cela ne m’a pas empêchée de poursuivre mes activités sportives ou de danse par ailleurs, ni ne m’a coupée de mes amis ou de ma famille. Cependant, réserver des moments de silence total m’a été nécessaire pour permettre à ce que j’avais en tête de se déverser en flot sur le clavier. Avec le temps, c’est même devenu un besoin.
Pour écrire ce roman et aborder les différentes périodes historiques couvertes, j’ai dû faire un travail préparatoire important : j’ai fait beaucoup de recherches et lu beaucoup d’ouvrages et d’articles. Lorsque j’avais l’impression de connaître suffisamment de choses sur une époque ou sur un sujet particulier, alors je m’asseyais face à mon écran et le texte coulait, se distribuant tout seul dans les bouches de mes personnages. Parce qu’il avait en quelque sorte macéré dans ma tête pendant des semaines. Il me semble que pour moi, cet épisode de maturation était crucial.
Je pense en tout cas que lorsque l’envie d’écrire, de raconter une histoire est réellement prégnante, alors le temps se trouve tout naturellement.

Les freins… 

Je dirais que le principal obstacle, c’est soi-même. Cela m’a pris du temps de faire taire la petite voix qui susurrait « il y a tant de livres qui paraissent, écrits par tant de gens hyper brillants alors que moi, je n’ai aucun talent ». J’ai beaucoup douté de moi, de ma légitimité en tant qu’auteure, de mon projet, de ma capacité à le mener au bout. 
Un autre frein que j’ai identifié est, par moment, l’impression que plus rien n’avance, que les idées se sont taries. Je me suis retrouvée parfois avec la sensation terrible de ramer, de ne plus rien pouvoir écrire qui ait de l’intérêt. La confiance en soi est forcément ébranlée. Mais heureusement, Frédérique était là, me suggérait une approche ou un angle d’attaque auquel je n’avais pas pensé et la machine se remettait en route.

Sur quoi travailles-tu en ce moment ?

Je travaille sur un roman qui couvre la période de 1868 à 1947. Il raconte l’histoire de personnages originaires de pays européens différents, que l’histoire va finalement rassembler et réunir sur un autre continent. Mais surtout, c’est un hommage à des personnes de ma famille dont l’histoire et la force de conviction, étaient tout à fait extraordinaires. Je voulais laisser à ma fille et mes neveu et nièce, l’empreinte de la pensée des gens qui les ont précédés, laisser une trace de leurs histoires pour qu’elles puissent se transmettre.

Un conseil à donner à d’autres auteurs ? 

Je ne suis pas sûre d’être en mesure de donner des conseils, après tout, je suis une débutante moi-même. En toute humilité, je voudrais citer les conseils d’un romancier que j’ai rencontré par le plus grand des hasards, dans les rayons de la Fnac : « Si vous avez envie d’écrire, lancez-vous ! Ecrivez pour vous faire plaisir, sur un thème qui vous plaît et ne le perdez pas de vue ». Je rajouterais : soyez patient, ne désespérez pas, revenez à votre texte et reprenez-le ou alors réécrivez le mais n’abandonnez-pas, ce serait dommage.
D’autant que l’écriture apporte de vrais moments de grâce et vous transforme d’une certaine manière en vous immergeant dans un autre espace-temps. Je ne peux parler que pour moi bien sûr, mais je dois dire que je suis émerveillée lorsque je regarde l’heure et que je réalise soudain que cela fait plus de deux ou trois heures que j’écris sans discontinuer, sans m’en apercevoir. C’est comme si l’histoire se racontait toute seule, en dehors de moi.
Je suis émerveillée quand des personnages que j’ai inventés se mettent à exister par eux-mêmes et à me hanter jour et nuit, comme s’ils étaient réels ou comme s’ils tenaient à ce que je raconte leur histoire.

L’un de ces personnages était devenu tellement présent dans mon esprit, que j’ai dû finir par le tuer pour le faire taire en quelque sorte. Je l’ai fait en pleurant comme une madeleine sur mon clavier, comme si j’avais vraiment perdu quelqu’un.

C’est merveilleux aussi de s’apercevoir que la nuit, l’histoire continue à se raconter dans votre tête. Vous vous dites, dans un demi-sommeil : « Ah mais oui, c’est pas mal, ça ! » et puis vous vous rendormez et le lendemain, hélas, ces mots que vous trouviez si formidables ne sont plus là et il faut les réinventer. Il ne faut pas se priver de ces plaisirs-là.

Comment utilises-tu le coaching ?

Je travaille surtout par mail avec Frédérique : je lui envoie mes textes qu’elle relit et me retourne accompagnés de ses remarques ; je les retravaille alors en tenant compte de ses annotations. Nous nous parlons aussi régulièrement par téléphone ou nous retrouvons en face à face pour faire un point plus long ou plus détaillé.
Le coaching est précieux à mon avis car l’auteur, en écrivant, garde la tête dans le guidon et ne se rend plus compte, même après maintes relectures, qu’un point n’est pas clair, qu’il y a un décalage temporel, qu’il a oublié un point important. Sans parler des coquilles qui échappent aux relectures ! Mais surtout, le coaching de Frédérique est précieux pour ses encouragements, son accompagnement dans les moments de doute, son écoute attentive et ses remarques toujours percutantes et lumineuses.
En ce qui me concerne, je sais que je n’aurais jamais pu mener ce projet à bien sans elle. L’écriture de mon roman touche à sa fin, nous en sommes aux relectures et réécritures de certains passages et si jamais je décide d’écrire un autre roman, je sais déjà que je demanderai à Frédérique de m’accompagner.

Interview réalisée en janvier 2020
Photo fournie par l’auteur