Comment c’est venu, l’écriture ?
Je dirais, même si ça fait un peu mystique, que l’écriture est venue à moi. Adolescent, c’était ce que j’avais trouvé de mieux pour inscrire mon malaise. J’ai écrit un récit entier au stylo rouge, tout un programme ! En réalité, j’ai toujours aimé écrire : enfant j’écrivais des saynètes que nous jouions devant la classe avec quelques copains, ado j’écrivais des sketches pour ma troupe de théâtre, adulte j’ai écrit une pièce de théâtre avec une amie, que nous avons jouée trois semaines à Toulouse, à la Cave Poésie. Ça s’appelait « L’un contre l’autre », ça reste un très bon souvenir. Ensuite, je n’ai plus voulu écrire pendant une grosse dizaine d’années. Trop d’inhibitions, pas assez de recul par rapport à ce que j’écrivais, c’était brûlant, je ne pouvais pas m’approcher. Et puis en 2014, j’ai commencé à écrire quelque chose qui ressemblait à un monologue adressé à une personne disparue. J’ai eu envie (besoin ?) d’en faire un roman, d’extrapoler, de mettre en scène, sans doute pour reprendre la main sur le cours des événements. J’ai rencontré Frédérique à ce moment clé, à travers un atelier courriel concerné au polar. J’ai écrit, cherché la forme, trouvé des personnages. C’est devenu mon premier roman « Retrouver Gabrielle ».
Comment écris-tu ? Quels freins dépasses-tu ?
J’écris les jours où je ne travaille pas. J’ai choisi de ne pas mêler les deux, de maintenir deux espaces distincts. Il y a la vie quotidienne, les tâches, le travail (prenant). Et puis il y a les journées où je peux mettre mon costume d’auteur et m’autoriser à voyager à travers mes écrits. Mais cela demande du temps, un environnement stable et bienveillant, et surtout : ne pas être interrompu. Pas de téléphone, pas d’amis à voir, pas de rendez-vous de prévu. Juste moi et mon ordinateur ou mon carnet, ça dépend de l’étape d’écriture dans laquelle je me trouve.
Je préciserais aussi que je ne décide pas toujours d’écrire. Parfois ce que j’ai à écrire n’est pas prêt à sortir, ça n’est pas mûr. Je sens que ça ne servirait à rien d’essayer. Et parfois, je sais que c’est là, ça pousse pour sortir. Pas le choix.
Des freins que je dépasserais ? Pour le moment, j’ai croisé l’autocensure (terrible) et la difficulté à « lâcher mon style », c’est-à-dire à dépasser l’idée d’écrire « bien » qu’on nous inculque beaucoup à l’école. Le genre d’injonctions « sujet verbe complément » ! Je sens en ce moment que mon imagination ose s’exprimer davantage, amenant mes personnages dans des endroits inconnus…
Comment utilises-tu le coaching ?
Tout d’abord, j’avoue une chose : je n’ai jamais autant écrit que depuis que je suis « coaché ». Bon, je n’aime pas ce terme, donc je dirais « accompagné » mais finalement ça va plus loin que ça. Nous construisons une relation autour des textes. Frédérique est la première lectrice de tous mes textes depuis 5 ans.
Dans mon cas le coaching, ça se passe comme ça : 1/ j’écris, puis 2/ je relis et je retouche et quand je sens que je ne peux pas aller plus loin seul devant mon document word, 3/ j’envoie à Frédérique. Très rapidement, 4/ j’ai un retour détaillé sur le texte envoyé, et à partir de là 5/ je reprends mon texte. Les indications, les questions, les encouragements, les doutes émis par Frédérique me permettent d’écarter les lignes du texte et d’aller attraper ce qui se cache derrière, pour le ramener au premier plan. C’est passionnant. Il ne se passe pas une semaine sans que j’envoie un texte et que Frédérique me réponde. Un ping pong. Voilà : je dirais qu’avec Frédérique, c’est un ping pong de retravail des textes !
Un premier roman édité, ça a provoqué quoi, chez toi ?
Beaucoup de sentiments contradictoires.
J’étais heureux qu’une maison d’édition m’appelle pour me rencontrer, bien entendu, mais si c’était à refaire, je ne le referais pas comme ça. Les petites maisons d’éditions n’ont pas de moyens (apparemment) et donc je n’ai pas été accompagné. Le travail éditorial, j’ai dû le faire moi-même avec des amis grands lecteurs ou profs, la promotion du livre c’est la même chose, bref cela m’a un peu découragé, énervé, et ça a gâché le plaisir que je pouvais éprouver à « être édité ». Je suis auteur, pas VRP. C’est très compliqué de « vendre » sa création.
Je crois que pour le premier roman, j’ai tâtonné, je n’ai pas vraiment pu prendre la mesure de ce qui se passait. Pour les suivants, je serai plus aguerri, et donc je suis certain que je vivrai les choses différemment.
Un conseil aux auteurs en puissance ?
Pour ce qui concerne l’écriture en elle-même : de prendre du plaisir, de s’amuser, et de ne pas rester seul.e face aux textes. Rien de pire. Tout auteur a besoin de retours. Pour progresser, avancer et aussi pour être content de ses textes. La phase « ce que j’ai écrit est nul » est un passage quasi obligatoire, mais si l’on confie son texte à un.e coach, alors il se passe autre chose : on obtient la lecture d’un.e autre.
Pour ce qui concerne l’édition : soyez TRES vigilant.e.s ! Avant d’accepter quoi que ce soit, ne vous fiez pas à ce plaisir narcissique dès qu’une maison d’édition vous a dit oui. Etudiez les conditions, questionnez des auteurs publiés par cette maison, comment s’est passé l’accompagnement, la relecture, la mise en avant, … ? Il vaut mieux dire non et chercher de la qualité ailleurs.
Tes projets ?
Je travaille (notez le terme !) en ce moment à un deuxième roman, très différent, me semble-t-il, du premier. J’ai commencé à l’écrire en août 2019, et depuis septembre, avec Frédérique, nous travaillons à l’élaboration de ce roman. A travers nos échanges (mes envois – ses retours) et puis aussi grâce aux points que nous effectuons, environ toutes les 6 semaines. Lors de ces moments-là, nous nous rencontrons, et nous discutons de l’avancée du roman, de sa structure, des personnages, … C’est aussi un moment où je peux lui poser des questions, et où elle m’en pose aussi. Par exemple, des questions très pratiques sur la situation d’un personnage « il arrive d’où ? Et il a fait comment pour arriver là ? C’est son argent ? celui de ses parents ? » etc.
Je souhaiterais avoir terminé le premier jet en juin 2020, et commencer à le faire lire à mes bêta lecteurs. Mais ça, c’est une autre histoire !
Donc 2020 sera l’année de fin de l’écriture du roman #2, la relecture, le retravail et, qui sait, la recherche d’une maison d’édition ? Mais là encore, il est trop tôt pour y penser !
Interview réalisée en décembre 2019
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